Depuis près de 15 ans, nous observons un phénomène récurrent : plus de 95% des PME atteignent, un jour ou l’autre, leur « plafond de verre », cette limite invisible mais bien réelle qui les empêche de poursuivre leur croissance.

Certes, selon le segment de marché visé, l’originalité du produit, la qualité des équipes et le profil des dirigeants, ce plafond arrive plus ou moins vite, à des valeurs de chiffre d’affaires différentes. Mais il finit toujours par arriver, inéluctablement.

Pourquoi ?

Une entreprise se crée et croit en fonction du niveau de son équipe dirigeante. Si celle-ci n’est pas à la hauteur, elle meurt assez vite. Si elle est moyenne, la structure vivote et croit peu. Si elle est performante, l’entreprise se développe rapidement, mais atteint, toujours, son plafond de verre.

Qu’est-ce qui ne va pas ?

En règle générale, il s’agit d’un problème de modèle : la grande majorité des nouvelles entreprises se construisent sur un modèle dit « héroïque » où les fondateurs sont au four et au moulin pour assurer le décollage de l’activité. Ils ressemblent aux pionniers de l’Aéropostale, les Mermoz, Saint-Exupéry ou Guillaumet, qui faisaient tout eux-mêmes et exploraient sans relâche de nouvelles routes aériennes vers l’Afrique ou l’Amérique du Sud. Heureusement, le transport aérien ne ressemble plus à cette époque certes exaltante mais dangereuse (les trois héros sont morts en effectuant leur travail !). Aujourd’hui les pilotes ont un rôle bien précis et sont aidés par des équipes au sol et en vol pour mener à bien leur mission. Le secteur s’est structuré et a réussi à mettre en place un modèle industriel réellement scalable qui a permis le développement du tourisme de masse.

A quoi reconnaît-on un modèle non scalable ?

Lorsque les dirigeants expriment leurs difficultés, certains propos permettent d’identifier rapidement les symptômes d’un manque de scalabilité :

« J’ai du mal à recruter des personnes en position de middle managers » (*)

« J’ai un turnover important dans mon équipe commerciale » (*)

« J’aimerais jouer au golf plus souvent. Deux fois par trimestre, ce n’est pas assez à mon goût » (*)

« J’avais réussi à autofinancer ma croissance jusqu’alors mais j’ai dû faire un emprunt bancaire alors que mon mark-up est toujours excellent » (*)

« J’aurais dû vous écouter il y a deux ans et structurer plus tôt mon back-office. Nous croulons sous l’administratif et les règlements clients sont de plus en plus lents » (*)

« J’avais l’intention de vendre ma société, mais les propositions reçues sont très en deçà de mes attentes : on me reproche d’être la pierre angulaire de l’activité ». (*)

(*) : cas vécus.

S’agit-il d’un manque d’ambition ?

On entend quelquefois cette phrase : « Nous ne voulons pas croître, nous ne voulons pas devenir une Licorne, nous sommes heureux comme nous sommes, notre équilibre vie privée – vie professionnelle nous convient très bien ». Certes, tous les fondateurs ne rêvent pas de changer le monde, mais la plupart ne sont pas dénués d’ambition. Ils ne savent tout simplement pas comment s’y prendre pour changer d’échelle. Ou ont peur de franchir le pas…

Changer d’échelle : une affaire de courage et de lâcher-prise

La scalabilité n’est pas une fin en soi, mais elle constitue l’ingrédient indispensable à une croissance durable. Outre que la stagnation profitable est une chimère (les concurrents finissent toujours par imposer des baisses de tarifs qui, si elles ne sont contrecarrées par de l’innovation, conduisent au déclin), nous sommes persuadés que le syndrome du plafond de verre est plutôt le reflet d’une difficulté à se projeter dans un avenir différent et à abandonner ses idées premières.

Sortir de sa zone de confort où l’on reproduit ce que l’on a appris, ce que l’on a fait hier avec succès, pour construire une autre vision, une autre organisation, un autre modèle de management fondé sur la délégation et la confiance a priori est indiscutablement anxiogène, mais c’est une démarche incontournable pour partir à l’assaut de nouveaux sommets.

Franck Lacombe – Fondateur et associé