Il existe de nombreux articles au sujet de la scalabilité des startup. Nous en avons déjà présenté dans ce blog. C’est une approche qui permet de sécuriser la croissance et les marges d’une entreprise. Nous l’avons vu, elle s’adapte tout particulièrement aux jeunes pousses du secteur numérique. Mais quand est-il pour les entreprises plus « matures » ?

Notre conviction est que la scalabilité s’applique aussi à elles,  mais que la démarche nécessite une forte volonté de la direction de l’entreprise :

  • Volonté de repenser son business model en capitalisant sur ses acquis, mais en lui faisant prendre une direction conforme à un modèle scalable. C’est-à-dire un modèle qui lui permet d’avoir le potentiel de multiplier ses revenus avec un effort marginal.

Par exemple Apple est passé d’un business model uniquement centré sur l’innovation et la production de matériel à un business model davantage orienté vers les services dématérialisés. En effet, iTunes et l’App-Store permettent à Apple d’engranger des revenus au niveau mondial 365 jours / an et sans intermédiaire.

  • Volonté de repenser l’organisation, les process, les outils pour éviter que le maillon faible de la chaîne de valeur ne grippe l’ensemble sur dispositif. On s’aperçoit souvent que le manque de délégation des managers et le manque de responsabilisation des équipes sont un frein majeur à la croissance de l’entreprise. A cela, le Lean management est une partie de la réponse. Mais au-delà des méthodes, et pour reprendre le célèbre proverbe : « un escalier se balaie en commençant par le haut », la clé du succès est surtout la volonté et le courage de la direction de montrer l’exemple et de revoir ses méthodes de management.

Pour illustrer notre propos, voici 5 thèmes qui donnent un éclairage supplémentaire :

  1. Définir la stratégie de l’entreprise.
  • C’est construire une vision de son entreprise en définissant une vue prospective sur son développement dans les 3 ou 5 prochaines années :
    • Quel sera mon business model, en quoi est-il « scalable » ?
    • Quels seront mes produits et services ?
    • Qui seront mes clients ?
    • Qui seront mes partenaires de vente et de déploiement ?
    • Quels seront mes objectifs de chiffre d’affaires et de marge ?
    • Quelles seront mon équipe et mon organisation ?
  • Dans cette réflexion, une entreprise « mature » doit tenir compte de son historique et de sa situation actuelle, aussi le préalable à cette projection dans l’avenir est de réaliser un bilan objectif :
    • Qu’est-ce qui fonctionne ?
    • Qu’est-ce qui nécessite des améliorations ?
    • Quelles sont mes forces, faiblesses, opportunités, menaces
  • Il faut également définir la trajectoire, c’est-à-dire le plan d’actions pour atteindre cette vision. C’est ce qui est le plus difficile pour une entreprise qui n’est pas une startup : savoir évoluer, voire prendre un virage à 90° sans casser l’existant et prendre le risque d’un « trou d’air » entre l’ancien et le nouveau modèle.
  1. Piloter le projet de transformation
  • Les plus grands enjeux sont de construire l’avenir tout en faisant fonctionner l’existant. Par expérience, les travaux quotidiens prennent trop souvent le pas sur les évolutions et les innovations
  • Notre recommandation est de mener le plan d’actions cité plus haut comme un projet de transformation :
    • Monter une équipe dédiée et nommer un directeur de projet
    • Planifier les actions à mener avec des jalons à respecter
    • Communiquer et former les personnes impliquées dans le changement
    • Assurer un suivi régulier de l’avancement et des éventuelles difficultés rencontrées
  1. Encourager l’intelligence collective et l’amélioration continue
  • Favoriser la réflexion systématique et en équipe pour résoudre un problème et encourager ainsi l’amélioration continue.
  • Les idées ne doivent plus seulement venir du manager ou du dirigeant comme dans une entreprise traditionnelle, mais également du terrain
  • Mener régulièrement des bilans sur les livraisons clients. Au-delà de l’avis qui est demandé au client, il faut aussi mener une réflexion interne sur les points d’amélioration :
  • Sur la démarche commerciale. Avait-on bien compris les besoins du client, la proposition commerciale était-elle adaptée ?
  • Dans les processus et l’organisation qui ont permis de livrer la commande, quels ont été les points positifs et les points à améliorer ?
  • Est-il possible d’améliorer la marge ?
  • Est-il possible d’améliorer la satisfaction du client ?
  • Est-il possible d’améliorer les conditions de travail des salariés ?
  • Quelles sont maintenant les attentes du client, que peut-on lui proposer de plus ?
  1. Manager autrement
  • Privilégier la transversalité au système hiérarchique pyramidal, décloisonner les services, faciliter la participation et la communication interactive entre salariés et équipes dirigeantes
  • Favoriser la prise d’initiative individuelle et collective
  • Redistribuer les rôles entre les collaborateurs, voire entre le management et les équipes, en fonction des objectifs prévus.
  • A ce propos, « l’intrapreneuriat » peut être une approche intéressante qui permet d’encourager l’innovation. Les salariés peuvent mener un projet innovant de bout en bout au sein de l’entreprise. www.challenges.fr/start-up/qu-est-ce-que-l-intrapreneuriat_28858
  1. Accompagner le changement auprès des équipes.
    • Toute volonté de faire « bouger les lignes » doit obligatoirement s’accompagner d’explications, de communications, de formations.
    • Par expérience, toute annonce de changement crée de l’inquiétude auprès des principaux intéressés et cela peut même aller jusqu’à l’opposition. Transformer une entreprise doit donc obligatoirement être accompagné :
    • Expliquer la vision : où voulons-nous aller, pourquoi et comment ?
    • Communiquer : en quoi l’implication de chacun est importante, quel sera votre nouveau rôle ? Quel sera le calendrier du changement ?
    • Former : Dans une entreprise « mature », l’innovation est souvent perçue comme destructrice, avec des métiers qui vont disparaître et d’autres qui vont émerger. De nouvelles compétences vont devenir nécessaires. Il faut anticiper les besoins de formation avec un calendrier aligné sur les autres changements de l’entreprise.

Adopter la scalabilité pour une entreprise « mature » implique une forte remise en question de la part de l’équipe dirigeante, l’approche traditionnelle consistant davantage à ajuster l’existant qu’à le réinventer.

Il est vrai que rendre une startup « scalable » est plus facile à mettre en œuvre et à faire adopter en interne. Pourtant, l’enjeu est important, la scalabilité est une formidable opportunité pour des dirigeants de repenser leur entreprise et de se donner les moyens d’accélérer sa croissance et de la rendre durable.

A titre d’exemple, voici 3 entreprises qui ont su réinventer leur business model

www.reportingbusiness.fr/entrepreneur/changement-modele-economique-exemples.html

Eric Andrieu, Associé